Les villages verticaux de Toufik Abou-Haydar
(Le laboratoire existentiel - mars 2019 - 196 pages - collection l'Illuscript)
---------------------------------
L'éditrice Anne-Ségolène Estay a pris beaucoup de soins pour l'édition de ce roman, "illustré" des mains de l'auteur Toufik Abou-Haydar.
Il faut le signaler, tellement c'est devenu rare de trouver des livres agréables à tenir en main. C'est tout le mérite de ce "laboratoire existentiel", énigmatique nom pour un éditeur. Si vous cliquez sur "laboratoire existentiel" vous saurez tout sur ces deux mots mis en harmonie.
"Illustration" au cœur du livre et "artisanat" au centre de ses préoccupations peuvent être annoncés comme slogan qui prend tout son sens quand on tient le livre en main.
J'ai noté quelques imperfections dans le texte, toutefois, globalement j'ai apprécié l'histoire de ce roman sur fonds historique.
Quand Aïda était enfant, une voyante lui prédit qu'elle se marierait avec un prince charmant.
Elle l'a attendu en vain et au moment de sa puberté, elle pouvait être mariée à tout moment selon les coutumes de son pays. Mais comme elle était belle, elle a dû se voiler pour cacher son visage. Et puis, un jour, dans la campagne, elle a été violée ce qui accéléré le cours de sa vie : il fallait absolument se marier pour effacer la "honte", ses parents devant même partir au Liban.
Aïda a tout perdu dans cette dramatique affaire : ses racines et sa famille.
Et puis, en février 2015, tout bascule en Syrie et dans le village d'Aïda. Son mari est arrêté et un médecin français, Marteneau, vient s'installer pour soigner les djihadistes.
Elle est obligée de se marier au mokhdar mais comme il veut s'assurer qu'elle n'est pas enceinte, il la met en "isolement" pendant 100 jours sous le contrôle de sa première femme, Tahiya.
Son histoire du "prince charmant" lui revient comme un boomerang quand on lui donne à lire "La princesse endormie".
Les cent jours arrivent à leur thème mais sa liberté n'est que conditionnelle et elle n'a qu'un espoir, c'est de s'échapper d'ici et de rejoindre sa famille au Liban.
Plusieurs personnes dont Tahiya vont tout faire pour que son espoir puisse devenir réalité.
Débute alors, une sorte de "road-movie" à travers le chaos syrien.
Comme l'annonce la 4e de couverture : "Quoi que tu fasses, le boomerang finit toujours par revenir dans ta main".
Un roman et plus encore un éditeur à découvrir.
Merci à Anne-Ségolène Estay de m'avoir adressé ce roman. J'avais dit que je serais honnête, donc je répète que ce roman a des défauts, avec des coïncidences de rencontres, par exemple, qui font penser aux contes. Mais, finalement, ce roman est peut-être un conte ! Je n'y avais pas pensé avant d'écrire ces lignes, tellement ce livre s'inscrit dans la triste réalité de la Syrie d'aujourd'hui.
Et puis il y a les illustrations qui vienne concrétiser les propos et en livrer leur "magie", sans oublier que le style est bien ciselé et donne de belles envolées lyriques.
Faites-vous donc votre propre opinion en lisant ce livre.
Bonne lecture,
Denis
Malgré sa prison en terre cuite, la présence du livre donnait à Aïda l'envie de sourire, de rire, de palpiter, de sauter de joie et de s'envoler comme jamais depuis longtemps. Le souvenir de la prédiction de la Bédouine en avait réveillé d'autres, comme un lac qui se remplit d'eau après une longue période de sécheresse : le village de son enfance ressurgissait sous ses yeux, elle courait de nouveau dans les ruelles du petit hameau, de ce minuscule point de la terre qui l'avait vue grandir et resplendir. (page 43)
Fabienne 08/07/2019 10:04
DENIS 13/07/2019 16:45