19 février 2015
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Un poète : Mahmoud Darwich (1941-2008)
Un recueil : Comme des fleurs d'amandier ou plus loin (Actes Sud - 2007)
Traduit de l'arabe (Palestine) par Elias Sanbar
Paru à Beyrouth en 2005 - Titre original : Ka-zahr al-lawz aw ab'ad
Un poème :
VOILA QUE LES MOTS
Voilà que les mots volettent dans ma tête.
Je me souviens d'une terre au nom céleste portée
par les mots.
Les morts ne rêvent pas souvent et s'ils rêvent
personne ne croit leurs rêves...
Voilà que les mots volettent dans mon corps,
abeille après abeille...
Si j'écrivais du bleu sur le bleu,
les chansons verdiraient et la vie me reviendrait.
Par les mots, j'ai trouvé plus court le chemin
jusqu'au nom...
Les poètes ne sont pas souvent joyeux
et quand ils le sont, personne ne les croit...
J'ai dit : Je suis toujours vivant
parce que je vois les mots
voleter dans ma tête.
J'ai en tête une chanson
qui va et vient
entre la présence et l'absence,
elle n'ouvre la porte
que pour la refermer... Une chanson sur
la vie de la brume mais elle n'obéit
qu'aux mots que j'ai oubliés !
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Mahmoud Darwich a été un des plus grands poètes de notre temps. Ce recueil est magnifique à l'image de son titre.
La 4e de couverture du livre dit :
Mahmoud Darwich poursuit dans ce recueil une recherche commencée il y a au moins dix ans, aux frontières de la poésie et de la prose. Mais au-delà de toute préoccupation technique, demeurent ses choix premiers : en poésie, toute idée, toute pensée doit passer par les sens ; toute poésie est d'abord orale, et par là musique ; et elle s'arme de fragilité humaine pour résister à la violence du monde.
On entre dans un monde intérieur qui regarde, se souvient, se cherche dans les autres et dans l'exil aussi, car une petite moitié du recueil est consacré à 4 longs textes à la fois prose et poésie sur le thème de l'exil.
Le premier de ces exils débute ainsi :
C'est mardi et le temps est clair, je marche
dans une rue latérale, sous un toit
de châtaigners... Je marche léger léger
comme évaporé
de mon corps, comme si j'avais rendez-vous
avec un poème. Je regarde ma montre,
l'esprit ailleurs. Je parcours les pages
Et ce poème se poursuit pendant 11 pages. On est emporté par les mots. Des phrases se répondent, se répètent aussi. L'ensemble du recueil est un hymne à la poésie comme mode de pensée. Le poète regarde, interprète et aussi se met en scène dans sa quête d'un sens à une vie.
Bonne lecture de ce poète palestinien incontournable,
Denis
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